mardi 25 août 2015

La prise de Scharnitz et de la Porta Claudia par les armées napoléoniennes en 1805

Portrait du général Comte Dumas,
Musée de  l´Armée à Paris
MATHIEU DUMAS Comte. Lieutenant-général des armées du roi.‎

PRECIS DES EVENEMENTS MILITAIRES OU ESSAIS HISTORIQUES SUR LES CAMPAGNES DE 1799 A 1814. (T III). ‎
‎A Paris chez TREUTTEL et WURTZ libraires 1819. 

Voici un extrait du tome troisième de ce Précis des événements militaires...consacré á la campagne de 1805 qui vit les armées napoléoniennes alliées aux Bavarois passer par Mittenwald pour pénétrer en Autriche.

Ce texte complète le texte consacré au 76e de cavalerie, déjà publié dans un post précédent. Les noms propres sont recopiés à l´identique du texte.

Pour des photos de la région parcourue par les armées napoléoniennes, cliquer ici (sentier des Français/ Franzosen Steig et Grünkopf) et ici (Porta Claudia)

L´extrait

[...]

Les seuls points par lesquels on pouvait envahir cette province [le Tyrol NDLR] étaient le passage de Fuessen, celui de Scharnitz, et la vallée de l’Inn par Kuffstein. Le point de Fuessen était trop rapproché de la masse des forces ennemies; celui de Kuffstein, au contraire trop éloigné, aurait donné à l´ennemi le temps de se rassembler dans la vallée de l’Inn, et de nous opposer des forces trop supérieures. Il ne restait donc que le passage de Scharnitz , au centre d’une ligne trop étendue et trop disséminée. 

Ayant par ces motifs déterminé son point d´attaque au passage le mieux fortifié par la nature et l’art, le maréchal Ney quitta la vallée du Lech , et remonta par sa gauche vers les sources de l’Iser. Après avoir marché par Pollingen, Murnau et Werdenfels, il arriva le 5 novembre à Garmischgau, et dans les environs de Mittenwald et de Partenkirch : il détacha le général Loison avec une partie de sa division , pour s’emparer du fort et du défilé de Leitasch, qui se trouve un peu à droite et sur les revers de la haute sommité qui domine les ouvrages de Scharnitz. Pour y parvenir, cette colonne, guidée par des chasseurs de chamois, dut s´engager dans des sentiers regardés comme impraticables. Surpris par cette attaque imprévue, se voyant entouré par une force très-supérieure, le commandant de ce poste fortifié capitula et se rendit avec trois cents hommes. 

Le général Loison divisa alors sa troupe en deux colonnes : l’une, achevant de franchir le col , se porta sur Seefeld pour tourner entièrement le pas de Scharnitz; l’autre gravit  plus haute sommité presque inaccessible, par les revers du côté de Leitasch, escarpée et coupée à pic du côté de Scharnitz; si l’on pouvait atteindre jusqu’au sommet, le feu des tirailleurs devait plonger à revers le retranchement, rendre la défense excessivement périlleuse , et le service des pièces de canon , dont le retranchement était garni, tout-à-fait impossible. 

Le 69e régiment de ligne formait cette seconde colonne, qui réussit à escalader ces rochers; c´étaient les mêmes soldats dont la valeur avait décidé l´affairre d´Elchingen ; aucun obstacle ne put les arrêter. Pour se défendre des balles et d’une grêle de pierres que les chasseurs tyroliens faisaient pleuvoir sur eux, ils attachèrent leurs sacs sur leur tête: couverts de cette espèce de boucliers, embarrassés de leurs armes, ils s´accrochaient aux arbustes, aux racines, fichaient les baïonnettes dans les fentes, s´entraiaient et gravissaient ainsi d´un roc à l´autre. Les coups de carabine et les quartiers de roche qui écrasaient ou entraînaient au fond des précipices quelques-uns de leurs camarades, animaient de plus en plus ces intrépides soldats; ils atteignirent enfin le sommet ou les Tyroliens se croyaient tellement surs de ne pouvoir être attaqués, qu´ils y avaient emmené leurs femmes et leurs enfants; ils furent dépostés aprés s´etre opiniatrement défendus, et presque tous pris et désarmés. Les aigles du 69e, plantées sur la cime des rochers, servirent de signal à l´attaque de front que le maréchal Ney avait préparée, et que celle du 69°, par le flanc gauche et par la. gorge, rendit aussi prompte que décisive. Le fameux retranchement de Scharnitz, espèce de demi-couronne construite à grands frais , ayant un large fossé taillé dans le roc , fut emporté d'assaut, et soit dans le fort même, soit à Seefeld, dix-huit cents prisonniers, un drapeau et 16 pièces de canon restèrent au pouvoir des Français. Maître de ce boulevard du Tyrol (l´ancienne_Porta Claudia), le maréchal Ney se porta sur Inspruck, où il arriva le 7 novembre. Cette capitale était évacuée , et l’archiduc Jean s’était retiré par la route du Brenner, et tenait ce passage important au centre du Tyrol , pour protéger les troupes qui évacuaient le Vorarlberg, et devaient se réunir à lui. Le maréchal trouva à l´arsenal d’Inspruck un grand nombre de pièces d’artillerie, seize mille fusils, et un approvisionnement de poudre très-considérable. Mais un trophée plus précieux, fut la prise que fit un des régimens de son corps d’armée (le 76°), des drapeaux qu’il avait perdus dans le pays des Grisons , et qui avaient été déposés à l’arsenal d’Inspruck. Pendant que le maréchal Ney pénétrait ainsi au centre du Tyrol, le 7’ corps de la grande armée , composé de deux divisions , et commandé par le maréchal Augereau, s’était avancé , de Stockach, sur Lindau et Bregenz. A son approche, le général Jelachich , qui commandait dans le Vorarlberg, fit évacuer les postes que ses troupes occupaient sur le lac de Constance, et les repli vers le camp retranché de Feldkirch : elles furent poursuivies et bientôt étroitement resserrées. Soit que l’ordre de l’archiduc Jean, d’évacuer le Vorarlberg, fût parvenu trop tard, soit que la rapidité et la vigueur avec lesquelles le général Maurice Matthieu , à la tête de sa division , poursuivit ce corps autrichien , ne lui eussent pas laissé le temps de faire sa retraite par la vallée de Pludenz, toutes ses communications se trouvèrent coupées. Tous les défilés du Tyrol septentrional, depuis la prise de Scharnitz, avaient été forcés ou abandonnés; il n’y avait plus un seul poste autrichien dans la grande vallée de l’Inn. [...]



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